mercredi 4 septembre 2013

L'HISTOIRE D'ALI (Part 13.)

     Le lendemain, un dimanche, Ali accepta l'invitation de Simone. Elle logeait chez un ami photographe un peu bizarre, qui avait une grande maison aux abords de Châlon. Elle n'était pas de la ville. Elle était née en Guadeloupe, ses parents étant  haut fonctionnaires là-bas, et elle avait grandi dans différents endroits, au gré de leurs mutations. Elle avait décidé de vivre de sa musique depuis plus d'une année, et allait dans chaque ville de France où elle connaissait du monde, afin de proposer aux bars et petites salles ses compositions. Ali et elle se comprenaient mieux sans doute à travers la musique que par la discussion, car elle s'éteignait vite. Ils se mirent à jouer, Simone lui montrant son répertoire. Elle avait écrit 2 nouvelles chansons, et elle avait besoin d'accompagnement. Ali lui montra les idées qui lui venaient, et il passa la semaine à retravailler dessus. Ils proposèrent à Sven de se joindre à eux au sax, ainsi qu'à un joueur de darbouka, copain d'Ali. 

    Après 3 répèts avec les 4 membres de leur nouveau "groupe", chacun se sentit plutôt content, et d'accord pour jouer le dimanche au bar. Le patron avait fait mettre des affiches et posté l'info sur les réseaux sociaux, autant dire un monde parallèle pour Simone et Ali, mais qui sembla fonctionner pas trop mal, car il y a avait un peu de monde. Ali se sentait nerveux, il lui semblait que ce n'était pas assez carré, que tout était flou. Il aimait les consignes très claires, et avec Simone, ça partait dans tous les sens. 
 

    Elle leur avait demandé de se fringuer années cinquante. Evidemment, ils n'avaient pas les tenues, alors elle les avait emmené dans un magasin de fripes, où chacun s'était trouvé un veston ou une veste, ainsi qu'une fine cravate. Sven avait des bretelles, et Karim, le percussionniste, avait emprunté des blazers de son père des années 60, marron et orange en polyester. "Royal ! " s'était enthousiasmé Simone, qui pour sa part, avait revêtu une robe violette en soie, qu'elle avait faite elle-même, et qu'elle portait avec des escarpins à paillettes. "Sympa, le mélange, style indéfinissable", pensa Ali en souriant. Les deux autres sifflèrent quand elle fit son entrée dans sa tenue du soir, revisitée, et elle, rajusta leurs cravates et leurs vestes. 
" Les gars, franchement, vous me faites honneur ! Vous êtes magnifiques. J'adore, c'est exactement ça, que j'imaginais... On sera les petits frenchies de New York, Ok ? 
  - Hein ? qu'est-ce que tu racontes ? demanda Sven 
   - Je déconne, mais je nous verrais bien faire quelques concerts à New York, avec ce style très français, on cartonnerait là-bas... Ils adorent ce qui est un peu "cliché français". Et pour peu que je leur fasse des chansons sur le smelly cheese, and we got it, men !
  - Putain , je rêve de New York depuis toujours..." ajouta Sven.
Les trois hommes éclatèrent de rire, chacun se prenant à rêver... 


 Le dimanche arriva, et le concert, bien qu'il n'eut pas beaucoup de spectateurs, fut un grand moment pour les quatre musiciens. Le noyau dur était indéniablement Ali et Simone, mais les deux autres se mêlaient assez bien, et captaient sans le savoir le style du groupe. Ils eurent des félicitations du patron, qui leur promit qu'il y aurait deux fois plus de monde la semaine suivante. 
   Ali allait au travail en flottant, passait sa journée à composer avec une guitare virtuelle, qu'il téléchargeait sur internet, fermant toutes les fenêtres dès que son supérieur entrait dans son bureau. Il se fit remonter les bretelles plusieurs fois, car il arrivait en retard et n'était pas aussi concentré qu'avant. Il s'en fichait. Il n'avait même pas peur de se faire virer, il pensait que ce serait le destin, et que ça le pousserait peut-être à faire ce qu'l avait vraiment envie de faire dans sa vie. DE LA MUSIQUE (AVANT TOUTE CHOSE !)*



                                                                                                                                                     EM



*L'Art Poétique, Paul Verlaine.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire