mardi 1 mai 2012

Et un jour de plus de Jonas Gardell


Et un jour de plus de Jonas Gardell (auteur suédois à succès, connu pour ses interventions virulentes à la télé, ses spectacles décapants), 1998.




Superbe roman suédois, où les voix intérieures de 4 personnages s’entrecroisent, livrant leurs pensées les moins avouables, les plus intimistes, et les plus désabusées. Car quelques jours avant le réveillon de l’an 2000, là où l’effervescence gagne certains, elle en paralyse d’autre, leur ramenant en pleine face l’étendue du désastre que représente leur vie. Pia, célibataire trentenaire esseulée : mange des chips devant la télé, balance le jambon à l’os de sa mère sur la moquette. Anna et Hakan, 34ans, mariés depuis 10 ans, mais déjà si vieux dans leurs têtes : ils ont deux jeunes fils, et ne partagent rien à part le quotidien rempli de tâche sans fin : faire les courses au supermarché, cuire les steaks trois minutes de chaque côté et agencer les assiettes et les casseroles habilement sur l’égouttoir. Henning, le vieux père d’Hakan, vit seul et a du mal à partager sa solitude avec sa famille. Anna va se réveiller un peu…

J’ai aimé les réflexions âpres sur la société de consommation et la perte de repères qu’elle engendre chez les individus, les coupant de plus en plus du sens de la vie. Le ton est désabusé, mais plein d’humour et de justesse.
« Cette année a été l’année où elle et Hakan se sont achetés des téléphones portables.
Pour qu’on puisse toujours les joindre.
Même s’ils ne savaient pas vraiment qui était susceptible de les joindre.
Mais ça leur avait semblé important.
Ils s’étaient persuadés que c’était important. »

Et ainsi de suite. Ces personnages croient qu’il faut effectuer certaines tâches, acheter certaines denrées, se comporter d’une certaine manière, aller en vacances vomir sur un voilier, filmer les anniversaires des gosses où l’on s’emmerde, remplir sa vie comme l’on remplit son frigo. Et mourir : pouf, comme ça, sans même s’être rendu compte qu’on avait arrêté de vivre depuis bien longtemps déjà.
C’est un livre captivant, drôle, qui fait réfléchir… l’air de rien.
EM

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