vendredi 11 octobre 2013

L'HISTOIRE D'ALI (Part.18)

    Le lundi, Ali s'installa à son bureau avec un peu de retard. Son collègue immédiat, Jean-Pierre, le dévisagea avec insistance, en soupirant. Ali se dit qu'il était fatigué, sans doute. Quand ils se levèrent pour aller à la réunion du lundi matin, Ali vit bien les gestes exaspérés de son collègue pour se saisir des dossiers sur son bureau. Une fois installés, Jean-Pierre lâcha devant les quatre autres collaborateurs : "On a des choses à se dire, ce matin, et notamment sur Ali". 
   Celui-ci en prit pour son grade. Son attitude était soit disant irrespectueuse, disait Jean-Pierre, et à chaque fois qu'Ali tentait de répondre, ce dernier lui lâchait : "Apprends à écouter." Au final, la réunion dura deux heures, et les seules choses concrètes qui furent reprochées à Ali furent d'avoir laissé les dossiers en cours dans son casier plutôt que sur le bureau. "La grande affaire, bande de crétins", se répétait-il en se mordant les lèvres.
      Après cette journée aussi ridicule que pénible, Ali arriva chez lui au moment où son téléphone sonnait. C'était son père, il laissa tourner le répondeur. "C'est la 3ème fois que j'appelle, t'es jamais là ou quoi ?! Tu pourrais quand même me rappeler, je suis ton père je te rappelle."
      Ali s'écroula sur le canapé. "Vive la technologie" songea-t-il en scrutant le répondeur. "En même temps, si je n'avais pas de téléphone, je n'aurais pas ces emmerdements. Le versant négatif de la technologie contient en germe sa solution. La vie est bien faite."  
   Il avait reçu un mail dans l'après-midi de Simone, annulant le concert du WE prochain, pour cause d'incident technique dans la salle en question. "Y'a des jours où tout merde... "  Il se redressa et décida de travailler la mélodie qu'il avait composé dans le train, et d'ajuster les paroles. Sa voie était ténue. Il n'avait jamais chanté. Grand dieu, il bafouillait, se grattait la gorge, et se sentait plus Etienne Daho enroué en train de muer que Pavarotti. Mais après une bière, quelques cigarettes, et deux heures de dérouillage des doigts et de la voix, il se surprit à prendre un plaisir inouï. Presque autant que sur scène, c'était dire ! Il décida de jouer tous les jours de la semaine. Il envoya même un message à Christophe, son ancien professeur de guitare, où se sentant en verve, il lui annonça qu'il préparait des titres pour un album. Rien que ça, songea-t-il en souriant. Et puis merde, et pourquoi pas, après tout ? Qu'est ce que ça change, que je m'éclate ? ça enlève quelque chose à quelqu'un ? Nan. Moi, ça m'apporte beaucoup, et puis peut-être que ça peut apporter quelque chose à d'autres, qui sait ?!
    Il sourit en recevant la réponse de Christophe : " RDV jeudi pour une répèt' ensemble". Aussi simple que ça. Journée de merde qui finit bien, pensa-t-il en se glissant dans son lit, prêt à sombrer dans un sommeil réparateur. Apaisé. Sans doutes et questions.... de toute façon, il dormait déjà du sommeil du juste...

                                                                                                                                                           EM

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