lundi 16 septembre 2013

L'HISTOIRE D'ALI (Part.15)

    Le lundi matin, après une nuit éprouvante et un réveil aux aurores, où il se dit qu'il avait raté sa vie, Ali commençait à retrouver sa raison en buvant un bon café. Il s'inquiétait beaucoup pour son avenir, et n'arrivait pas à se projeter positivement. Il se demandait pourquoi il allait à ce travail, même pas bien payé, qui lui permettait certes de payer son loyer et sa voiture, mais le maintenait prisonnier également. Il sentait qu'il ne pouvait compter que sur lui, quoiqu'il entreprenne. Il n'avait pas d'économies devant lui, et sa mère en mourant ne lui avait pas laissé grand chose. Le notaire leur avait bien dit, à son frère et à lui, qu'ils étaient propriétaires de l'appartement, mais son père habitait dedans, et ce probablement jusqu'à sa mort, en répétant que c'était chez lui à qui voulait l'entendre, comme si cela avait été contesté. Ali ne comprenait pas bien son attitude, mais se disait qu'il devait avoir peur d'être mis à la porte pour agir ainsi. Le patrimoine n'est-ce pas quelque chose que l'on se transmet, par définition ? On aurait dit que Youssef se faisait une joie de voir ses fils trimer, en baver dans la vie, et que les voir heureux l'excédait au plus haut point. 

    Depuis l'enterrement, Ali n'avait guère remit les pieds dans ce lieu, hanté de mauvais souvenirs. Il aurait aimé pouvoir y rester tranquillement de temps à autre, afin de boire un café avec Youssef, mais la réalité le rattrapait toujours : il se faisait agresser par le vieux en moins de deux. Youssef avait appris par la fille d'une voisine qu'Ali avait donné quelques concerts, mais il n'en laissa rien voir à Ali, se gardant bien d'évoquer le sujet. Il avait lui-même une grande blessure vis-à-vis de la musique : elle avait été source de frustration, puisqu'il avait arrêté sa carrière qui commençait à peine. Il disait que c'était par sacrifice pour sa famille, mais il savait bien que c'était de l'auto-conviction. Il n'avait pas assez cru en lui, tout simplement. Non pas qu'Ali crut fermement en ses propres talents, mais au moins, il ne plaçait pas la barre trop haute. Tant qu'il jouait avec d'autres, il était heureux. Le reste, il s'en moquait. Jouer avec Simone était un cadeau des dieux, et il comptait bien en profiter au maximum !

    C'est avec le sourire qu'il monta dans sa voiture ce matin, en chantonnant la dernière chanson de Simone.

Chorus
Vive les anti-héros,
ceux qui ratent tout,
et se plantent,
c'est si beau-au.
Moi je les aime, ils m'inspirent
Quand je les vois, je respire,
Mes demi-dieux du ratage,
Complices de tous les sacages
De l'ego-o !

Couplet 1
Ils ont cette nonchalance,
dans les pas, le mouvement,
qui rappelle la juste cadence,
celle où l'on prend son temps.
Et puis quoi ? qui a dit qu'il fallait être riche
Pour avoir réussi sa vie ?
Qui a dit, qu'il fallait sourire tout le temps,
Etre un employé modèle,
Une machine de guerre au bureau,
Marié, 2 gosses, un pavillon
un quat' quat',un écran géant dans le salon ?

Couplet 2
Un peu d'imperfection - pas juste passer pour un con-,
ne nuit pas- a!
Pourquoi se mettre la pression
se comparer, s'écorner,
quand tout ce qu'on essaie de faire,
c'est de trouver son bonheur ?
L'imperfection devient belle,
elle fait de nous des êtres entiers,
plein d'aspérités où s'accrocher,
pour grimper au sommet,
de l'humanité -é.

Chorus

Couplet 3
Regarde ta vie, contemple là
Qu'as tu fait de tes dix doigts ?
As-tu aimé autant que tu le souhaitais ?
Pris du bon temps, profité ?
Rate encore mon ami,
Fais comme disait Beckett,
"Essaie, rate, essaie encore,
Rate encore, rate mieux"
Ouais, toi ya pas, t'es mon dieu -eu*.

                                                                                                                                                   EM


*Tous droits réservés.



2 commentaires:

  1. 11 h 26 pour toi - ici 9 h 37 - il y a 10 ' que tu as envoyé ta nouvelle.
    Attachant cet Ali - c'est bien la 1ère fois que je m'accroche à un "feuilleton" (c'est pas péjoratif) BISES

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  2. l'anonyme a oublié de signé lili

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